Tu es dans quel état d’esprit à quelques jours de disputer une finale de Coupe de France ?
On y pense, mais on ne peut pas se permettre de se focaliser sur ça, parce qu’on n’est pas bien en championnat. Vendredi dernier (le 27 avril, N.D.L.R.), on devait être neuvièmes avant le match, on a perdu et tous nos concurrents ont gagné, et puis on s’est retrouvés relégables (l’interview s’est déroulée avant la victoire des Herbiers contre Laval (3-2), qui donne de l’air à Matthieu Pichot et son équipe dans la lutte pour le maintien en National 1 avant la dernière journée, N.D.L.R.).
Tu as 28 ans. Avant de jouer au Poiré-sur-Vie et au CA Bastia, Les Herbiers, c’est un club où tu étais déjà passé après un début de carrière à Laval...
En sortant de Laval, en Ligue 2, j’étais un peu dégoûté du foot. Je suis arrivé tard dans la saison aux Herbiers : en septembre (2011, N.D.L.R.). Je n’avais plus envie de jouer au foot. Je m’étais mis au chômage et j’avais repris des études pour devenir coach sportif.
Pourquoi ?
À la base, à Laval, ça se passait très bien. J’étais numéro deux, je commençais à jouer en Ligue 2. Qui plus est à Laval, chez moi, puisque je suis mayennais. Le club voulait me prolonger, le gardien numéro un – Arnaud Balijon – est resté, et moi, j’étais gourmand, je voulais jouer. J’ai refusé de prolonger, et mon agent n’a rien trouvé ou il a fait semblant de chercher. En fait, c’est la relation avec les agents qui m’a le plus dégoûté.
Tu t’es dit que tu aurais mieux fait de rester à Laval ?
Oui, surtout que Laval m’avait proposé de ne prendre personne en numéro deux en attendant que je trouve. Ce qui est quand même invraisemblable ! Ça arrive rarement dans le foot. Moi, je leur disais : « Non, prenez un gardien, c’est sûr que je ne vais pas revenir. » C’était idiot de ma part de vouloir partir. Finalement, j’ai repris goût au foot en allant aux Herbiers.
« À Laval, j’étais gourmand, je voulais jouer. J’ai refusé de prolonger et mon agent n’a rien trouvé ou il a fait semblant de chercher. En fait, c’est la relation avec les agents qui m’a le plus dégoûté. »
Tu es né à Sablé-sur-Sarthe, le fief de François Fillon. Un autre point commun avec lui ?
Un peu de cheveux blancs.
Où est-ce que tu as grandi ?
Je suis originaire de Château-Gontier, à une petite demi-heure de Laval. Étant petit, dès que j’avais un temps libre, je faisais du foot. C’est mon père qui m’a transmis le virus. Quand il jouait en vétéran le dimanche, j’allais avec les gars dans le vestiaire. Moi, je n’étais pas très très bon sur le terrain, et puis, un jour, à l’entraînement, je suis allé dans les buts et ça m’a tout de suite plu.
Comment définirais-tu ton style ? De ce qu’on a pu voir en Coupe de France, tu n’es pas académique, mais c’est ce qui fait ton charme finalement.
Je ne sais pas pourquoi on dit que je ne suis pas académique. Je pense être un gardien assez explosif, avec un bon jeu au pied. On va dire que je prône l’efficacité.
Plus que les autres années, tu sentais que cette fois, ton club avait coché la Coupe de France en début de saison ?
L’objectif du club, c’était d’aller en 32es de finale. Les quatre premiers tours, j’étais blessé. C’est Esteban Salles qui a joué. À Châteaubriant (Les Voltigeurs, en National 3, N.D.L.R.), au sixième tour, on s’est qualifiés en prolongation et il a très bien joué.
« Je ne sais pas pourquoi on dit que je ne suis pas académique. Je pense être un gardien assez explosif, avec un bon jeu au pied. On va dire que je prône l’efficacité. »
Toi, on t’a surtout découvert lors du quart de finale contre Lens. Raconte-nous ce moment, avant la séance de tirs au but, où tu t’isolessous une serviette pour regarder une vidéo de motivation...
Je n’ai pas eu énormément de travail à faire – un peu, en première période – durant le match. On était très dominés sans être en danger. Dans la semaine, mon entraîneur m’avait demandé mes gardiens préférés, et il avait préparé une vidéo de leurs meilleurs arrêts. En plus, je n’étais même pas au courant, et il avait aussi demandé leurs gardiens préférés aux autres gardiens. Je pensais que c’était juste par curiosité.
Qui est-ce que tu as vu sur cette vidéo ?
Surtout Buffon. Il avait des attitudes très confiantes avant des tirs au but, c’était lors de la finale de la Coupe du monde 2006 contre la France. D’habitude, les joueurs viennent te voir : « Allez, Pich’ ! » Le but, c’était vraiment de me couper de l’environnement. En voyant des arrêts de grands gardiens, je me suis dit : « Allez, pourquoi pas toi ?! » Même si on était menés au début de la séance, je me persuadais que j’allais en arrêter un. Le premier est arrivé, puis le deuxième...
Il paraît que tu extériorises beaucoup sur ta ligne, au point de parfois t’insulter toi-même quand tu prends des buts...
En fait, c’est surtout à l’entraînement. Ça pouvait m’arriver de péter les plombs lors de séances de frappes quand je prenais un but, beaucoup moins maintenant avec l’expérience de l’âge... même si ça arrive encore. (Rires.) La dernière fois ? Ça devait être la semaine dernière à l’entraînement.
Qu’est-ce que ça te fait de penser que mardi soir, des millions de téléspectateurs entendront : « Edinson Cavani s’avance face à Matthieu Pichot » ?
C’était inimaginable il y a encore deux mois. Déjà, nous, on est très contents parce que c’est gratifiant de jouer contre de tels joueurs. On va en profiter, hein.
Tu es conscient que tu peux repartir avec une sacrée valise ?
Ça peut m’arriver, mais si je peux l’éviter, ça m’arrangera. (Rires.)Quand on voit Monaco se prendre 7-1... il faut se préparer à tout. Ça ne serait pas honteux de prendre plein de buts.
« Quand on voit Monacose prendre 7-1... il faut se préparer à tout. Ça ne serait pas honteux de prendre plein de buts. »
Tu vas devoir prendre sur toi pour ne pas t’énerver ?
Je pense... (Rires.) Et pour me canaliser, j’improviserais.
En dehors du foot, tu joues du piano...
J’ai appris les bases quand j’avais vingt ans. Ensuite, j’ai vendu mon piano. Et là, je m’y suis remis au mois de décembre. J’aime bien la musique. J’avais essayé la guitare, mais je n’y arrive pas du tout avec mes gros doigts de gardien. Le piano, j’ai toujours trouvé ça beau. En ce moment, je suis en train d’apprendre Mad World, du film Sexe Intentions.
Ça te dirait de faire un morceau à quatre mains avec le Nîmois Umut Bozok ?
Apparemment, il est très doué. Mais je n’ai pas envie de lui faire honte, moi, je suis encore un débutant.
La particularité de la ville des Herbiers, c’est qu’il n’y a que 5% de taux de chômage. Le plein emploi, ça te rassure pour l’après-carrière ?
Je n’y pense pas du tout, et puis, je ne sais pas si je resterai aux Herbiers après ma carrière. J’ai une femme qui est gendarme ! On ne vit pas ensemble parce qu’elle est en région parisienne. Elle est maréchal des logis-chef. Pour la finale, elle a réussi à prendre deux jours de congé.
« Le piano, j’ai toujours trouvé ça beau. En ce moment, je suis en train d’apprendre Mad World, du film Sexe Intentions. »
Tu auras un rituel particulier avant le match contre le PSG ?
Quand j'entre sur la pelouse, je n’ai pas de rituel particulier. En revanche, quand je pars à l’échauffement, j’écoute toujours l’hymne de la Roma. Je suis un fan de la Roma depuis que j’ai dix-huit ans. Je suis d’abord tombé amoureux de la ville, puis du club. À tel point que je suis allé voir un Roma-Cagliari, 2-2 avec deux buts de Totti. Ce match n’a fait que consolider mon amour. Et, l’année dernière, je suis allé voir le derby Roma-Lazio. Après l’élimination face à Liverpool, j’étais dégoûté, forcément, à cause des erreurs d’arbitrage, mais Liverpool mérite sa qualification et la Roma est sortie avec les honneurs.
Imagine, vous battez le PSG... Vous pourriez affronter la Roma l’été prochain en Ligue Europa...
Le stadio Olimpico me fait rêver, mais j’espère que la Roma sera quand même en Ligue des champions !
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