sábado, 4 de janeiro de 2020

MAIS QUI ES-TU LE STADE ROBERT-BOBIN DE BONDOUFLE ?

Cinquième enceinte francilienne par sa capacité, le stade Robert-Bobin de Bondoufle sera, ce dimanche soir (20h55), le théâtre du match au sommet entre l’Espérance sportive et athlétique Linas-Montlhéry (R1) et le Paris Saint-Germain. Cette visite dans l’Essonne n’est pas une première pour les Parisiens, loin de là. En revanche, l’affluence prévue tranchera avec les moyennes habituelles d’un stade qui se cherche encore, près d’un quart de siècle après sa sortie de terre.

Quel est le point commun entre le Bayer Leverkusen, la Juventus, Panthrakikos, l’OGC Nice, le Celta de Vigo, l’Aris Salonique, le Legia Varsovie, le Red Star, Leiria, l’Athletic Bilbao, l’AS Evry, le FK Teplice ou encore Roulers ? Rien a priori, si ce n’est que tous ces clubs ont affronté le Paris Saint-Germain en match amical au stade Robert-Bobin de Bondoufle, dans l’Essonne. Une époque pas si lointaine, mais qui dénote avec les tournées asiatiques actuelles et les affiches de gala contre de grosses écuries européennes qui y sont programmées.



Évidemment, aucun joueur de l’effectif de Thomas Tuchel n’a jamais foulé la pelouse de l’enceinte qui porte le nom d’une légende française du triple saut, puisque la dernière fois que le PSG a joué à Bondoufle, c’était en 2010. Par un étouffant après-midi de mai, c’était d’ailleurs l’équipe féminine qui représentait les couleurs de la capitale en ce jour de célébration du 40e anniversaire du football féminin en France. Contre Montpellier, devant 4200 personnes, les joueuses de Camillo Vaz n’ont pas tenu à laisser une miette du gâteau (victoire 5-0) et ont remporté le premier titre de leur armoire à trophées : la Coupe de France.

Folie des grandeurs

Candice Prévost s’en rappelle bien, elle faisait partie de la sélection parisienne. « Ce jour-là rime avec un bon moment, mais de manière générale, le stade Bobin, c’est un stade qu’on n’oublie pas, peu importe les circonstances » , rembobine l’ancienne internationale tricolore. Pour résumer ? « Noir, froid et austère. La finale a démarré dans ce cadre-là et tout d’un coup, les ultras parisiens sont arrivés et ont ensoleillé les grands blocs de pierre de la tribune découverte. » Rebelote une décennie plus tard, sauf qu’en face, ce ne seront pas quelques familles avec enfants qui seront présentes, mais pas moins de 15 000 personnes survoltées. Soit la plus grande affluence de l’histoire de cette enceinte relativement méconnue et qui affichera guichets fermés pour la première fois. Après un quart de siècle d’errance, le renaissance du stade Robert-Bobin de Bondoufle serait-elle sur le point d’arriver ?

Retour en arrière. Au début des années 1990, Xavier Dugoin, président RPR du Conseil général de l’Essonne, a l’ambition de faire de son département une terre de sport. Coup de chance, il y a justement une compétition internationale prévue en 1992 : les Jeux de la Francophonie. Mais pour cela, il faut des infrastructures dignes de ce nom. Tant mieux, Xavier Dugoin a de l’ambition. Contre environ 400 millions de francs (environ 60 millions d’euros), il fait notamment sortir de terre un dôme omnisports à Villebon-sur-Yvette, une piscine à Mennecy (alors que les Jeux de la Francophonie ne comportent pas d’épreuve de natation) et le fameux stade Robert-Bobin, 18 850 places et, en ce temps-là, troisième plus grosse enceinte francilienne, derrière le Parc des Princes et Charléty.


Hélas, l’opération finit en eau de boudin. Déjà miné par des querelles politiques liées à la question du financement de ces travaux herculéens, le dossier menace d’exploser en vol devant la volonté de Xavier Dugoin de se retirer purement et simplement de la course aux Jeux. Un coup de bluff suivi d’un rétropédalage qui conduira finalement à décaler la cérémonie d’ouverture de deux ans ! Hasard ou non, celle-ci se tiendra finalement dans la Cour carrée du Louvre, au lieu d’Evry, comme prévu initialement. D’ailleurs, en dehors d’une poignée d’épreuves, l’Essonne ne marquera pas cette deuxième édition, contrairement à sa voisine capitale. En revanche, les grands travaux de M. Dugoin sont encore solidement ancrés dans le paysage du département. Et si le Grand Dôme de Villebon a fini par être repris par la Fédération française de judo, le stade Robert-Bobin cherche quant à lui toujours une exploitation à la hauteur de son potentiel.

Coloriser l’éléphant blanc

Entre-temps, cette enceinte ouverte aux quatre vents a été reléguée au cinquième rang des plus grands stades franciliens, depuis la sortie de terre du Stade de France et la rénovation du stade Jean-Bouin. Coincé entre l’A6 et la Francilienne, Robert-Bobin attire parfois le regard des automobilistes qui passent au loin en continu, mais sans jamais s’arrêter. Ou alors si peu. De l’avis général, la situation relève du gâchis. « Il a une très bonne pelouse vous savez, très bien entretenue » , jure Marie-Christine Terroni, présidente de la section féminine du Paris FC, dernier club résident, avec le FC Fleury (N2), depuis que l’AS Evry a fait l’ascenseur avec le National il y a dix ans. « Cela correspond à l’époque à laquelle on a commencé à se l’approprier pour répondre aux normes de la Ligue des champions » , reprend la boss historique de l’ex-FCF Juvisy. « On a bénéficié de l’appui du département, à qui le stade appartient, et progressivement, on a fini par abandonner le stade Maquin de Viry-Châtillon, où on évoluait par le passé. »

En dépit du manque de sièges coqués, de la piste d’athlétisme et de l’absence de structures pour filmer la tribune d’honneur (dont seule une petite partie est couverte), le stade Robert-Bobin est devenu la maison de ce mastodonte du football féminin hexagonal. « Même après la fusion avec le Paris FC, nous ne l’avons pas quitté. Il fait partie de notre identité essonnienne » , résume Marie-Christine Terroni avec une certaine tendresse pour ce stade où elle a vécu le plus beau match de sa vie : « La demi-finale de la Ligue des champions contre Lyon en 2013. En dépit de la défaite au match aller, 12 000 personnes étaient présentes ce soir-là. C’est bien la preuve qu’il est capable d’attirer du monde, malgré son manque de couleur ! » Amicaux internationaux - notamment de sélections africaines -, matchs de préparation pour le PSG, ou de gala pour les Bleues, Robert-Bobin a plusieurs fois réalisé d’honorables affluences, mais celles-ci restent exceptionnelles.


Vitrine du sport

Sophie Rigault ne pourrait être plus d’accord. La vice-présidente du conseil départemental en charge des sports ne manque pas d’exemples pour illustrer les diverses utilisations du bébé : athlétisme, football américain, tir à l’arc, rugby... Le stade Robert-Bobin a vu passer bon nombre de compétitions, du niveau local à l’international. Parmi les rencontres au sommet qu’il a accueillies, un match entre les féminines de la France et du Canada, mais aussi des matchs de préparation de la Côte d’Ivoire ou du Cameroun. Le bilan est un peu faiblard pour une infrastructure qui coûte environ un million d’euros par an au département. De quoi faire dire à celle qui est également maire de la commune voisine de Saint-Michel-sur-Orge que Robert-Bobin demeure une enceinte « sous-utilisée » . Près de 30 ans après sa naissance, l’Essonne reste une vitrine du sport et entend bien le montrer rapidement, mais sans grands travaux inutiles cette fois-ci. « L’objectif, ce sont les Jeux olympiques de 2024. Notre département doit aussi pouvoir participer à cet événement » , lâche Sophie Rigault, qui parle de mutualisation des forces en présence, à commencer par le Cluster Grand Paris Sport.

« Avec le président du conseil, on part du principe que l’Essonne est une terre d’avenir, dotée de très beaux domaines départementaux. Dans le cadre du sport, Robert-Bobin présente un grand intérêt et nourrit de grandes ambitions. En 2024, il ne sera pas un site de compétitions des JO, mais il a la capacité d’être un site d’entraînement par exemple. On en fera un fleuron du département, parce que ça a du sens. Le match de l’ESA contre le PSG sera plus qu’un simple coup d’envoi. C’est la meilleure publicité qui pouvait nous arriver » , se réjouit l’édile, qui espère valider le projet un an avant la cérémonie d’ouverture. Promis, on utilisera désormais ce qu’on a sous la main, plutôt que de se relancer dans des épopées ex nihilo. À l’heure où tous les regards sont tournés vers le futur Grand Paris, le stade Robert-Bobin de Bondoufle connaîtra peut-être finalement l’avenir de géant qu’on lui promettait à sa naissance. En attendant, les trois quarts de celles et ceux qui iront encourager Linas-Montlhéry devront peut-être encore subir une saucée sur la tronche, debout, au milieu des touffes d'herbe qui jonchent les gradins de béton découverts. « Mais vous verrez, avec un public aussi chauvin que le nôtre, l'ESA ira au moins aux tirs au but » , prophétise Marie-Christine Terroni. À Bondoufle, le soleil n’est jamais très loin de briller.

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